En architecture, rendons gloire aux femmes créatives et constructives

« Je ne suis pas une femme architecte, je suis une architecte » ©Studio O. Decq

« Je ne suis pas une femme architecte, je suis une architecte », voici ce que revendique Odile Deck, architecte et urbaniste française récompensée de dix prix différents, une des figures de la féminisation de la profession dans les années 90. Moins honorées et primées que leurs homologues masculins, les femmes subissent trop souvent un déficit de visibilité et de crédibilité. Et pourtant en architecture, il y a vraiment des femmes créatives. Des architectes constructives. Rendons leurs la gloire qu’elles méritent. Et que cela permette de mettre en lumière toutes celles qui ont laissé, laissent ou laisseront laissé une empreinte indélébile dans l’espace et dans le temps.

Si l’on demande au public de citer des architectes renommés, les plus renseignés répondront Tadao Ando, Jean Nouvel, Frank Gehry, Renzo Piano, Jean-Michel Wilmotte ou Rudy Ricciotti. Peu et même très très peu citeront Zaha Hadid, archi-star pionnière avec 950 projets dans 44 pays, Prix Pritzker, le Nobel de l’architecture. Ni Julia Morgan, première femme américaine admise à la section d’architecture des Beaux-Arts de Paris en 1898, qui a réalisé juste 800 constructions et entre autres l’université Mills Collège d’Oakland.

ET POURTANT ZAHA HADID

Le musée d’art contemporain de Rome est un des 950 projets dans 44 pays créés par l’architecte Zaha Hadid. ©Roland Halbe

Qui citera Catherine Jacquot, première femme élue en 2013 à la présidence du Conseil national de l’Architecture? Qui connaît Norma Merrick Sklarek, première femme noire aux Etats-Unis devenue architecte et autrice du Terminal One de l’aéroport de Los Angeles? Qui évoquera Kazuyo Sejima, diplômée de la Japan Women’s University, reconnue pour son architecture pure, ascétique se voulant une réinterprétation japonaise de la modernité ?

Qui sait que c’est Manuelle Gautrand, architecte française dont le crédo est « Réenchanter la ville », qui a réhabilité la façade des Galeries Lafayette de Metz et qui a obtenu dernièrement, avec son projet Alma Terra, un ensemble d’immeubles en terre coulée, une des Folies architecturales de Montpellier ? Comment ne pas mettre en lumière Rozana Montiel, Prix International 2022 ? Mais aussi Christelle Avenier, Prix femme architecte 2002 ou encore Cristina Vega Iglesias, Prix jeune femme architecte 2022 ?

Comment ne pas parler des Architizer’s A + Awards , le plus grand programme de récompenses au monde pour l’architecture et les produits de construction, où des femmes architectes de très grand talent ont été sublimées? Les Raha Ashrafi, Stella Betts, Tatiana Bilbao, Alison Brooks ou encore Sharon Davis ou Gabriella Carillo.

Julian Morgan, première femme américaine admise à la section d’architecture des Beaux-Arts de Paris en 1898, aura réalisé environ 800 constructions, dont la piscine du Berkeley Women’s City Club. ©Trevor Johnson.

LES ECOLES D’ARCHITECTES TROP LONGTEMPS FERMEES AUX FEMMES

Et pourtant, les femmes appartiennent à l’architecture depuis la fin du XIXe siècle. Leur entrée dans la filière est parallèle à celui de femmes dans d’autres cursus. Les pionnières sont souvent étrangères, américaines notamment avec Julia Morgan et Laura White. La femme architecte commence à trouver sa place réellement dans l’entre-deux-guerres et lors des Trente Glorieuses. Malgré tout, les écoles d’architectes françaises ont été très et trop longtemps closes pour la gent féminine. Le métier autant artistique que technique étant associé à une salve de professions du BTP justement très masculines.

L’architecte mexicaine Tatiana Bilbao a été lauréate spéciale des A + Awards 2017 , remportant le prix Impact pour son travail de conception de logements abordables et durables. ©Sam Deitch.

SEULEMENT 10% A LA TETE D’UNE AGENCE

Aujourd’hui, heureusement, certaines barrières se sont levées. Et les étudiantes en école d’architecture pèsent 60% des promotions. Alors qu’elles représentaient seulement 16,6% des inscrits à l’Ordre en 2000, la part s’élevait à 30,7% en 2019. De plus en plus de femmes architectes rejoignent pourtant des agences. Par contre, on peut regretter que moins de 10% de femmes soient à la tête ou la gouvernance d’un cabinet d’architectes. Il demeure de ce fait fondamental de mettre encore plus avant les femmes architectes pour sauver la profession au féminin.

Anne-Françoise Jumeau, lauréate du Prix femme architecte 2021

Anne-Françoise Jumeau, lauréate du Prix femme architecte 2021, Kansei TV
Anne-Françoise Jumeau, Femme architecte 2021. © Sergio Grazia. 

Les lauréates du Prix femmes architectes 2021 ont été dévoilées le 6 décembre depuis le Pavillon de l’Arsenal, à Paris. Succédant à sa consœur Florence LipskyAnne-Françoise Jumeau, fondatrice de l’agence AFJA, a reçu le Prix femme architecte 2021. Cette distinction qui récompense l’œuvre de femmes architectes est décernée tous les ans depuis 2013 par l’Association pour la recherche sur la ville et l’habitat. L’ARVHA entend ainsi encourager la parité dans une profession encore à forte dominante masculine. Pour cette 9e édition, l’association a reçu près de 500 candidatures et examiné plus de 1 500 projets. Anne-Françoise Jumeau avait quant à elle choisi de présenter au jury cinq projets. 

Cinq projets majeurs récompensés

Biopôle, espace d’entreprises scientifiques à Rennes (35)

« Le parti retenu, autant dans l’implantation urbaine que dans l’expression architecturale, consiste en un vaste quadrilatère autour d’une cour intérieure formant un atrium. Bien orienté, cet espace est à la fois le lieu d’accès, de détente et d’ouverture du projet sur les espaces d’accueil. Un vaste escalier en partie végétalisé le relie au niveau RDC et au parking. Ce patio est l’espace identitaire de référence du projet. À l’extérieur, la façade est revêtue d’une enceinte architecturale protectrice et filtrante. Des montants sinusoïdaux forment une peau sensible, épaisse et brise-soleil. La superposition de la trame de lames sinusoïdales en décalage avec celle des montants verticaux des coursives fabrique un effet de moirage dynamique. »

Résidence sociale Lorraine à Paris (XIXe)

Pour cette résidence sociale de 173 studios, l’agence AFJA a proposé de « conserver une partie des constructions existantes constituées de deux bâtiments parallélépipédiques en retrait des rues, construits en 1978 par Anthony Bechu architecte. La parcelle est densifiée tout en préservant une cour partagée et dédiée à la résidence. La composition des façades est liée au grand nombre de baies (plus de 350) et au souhait d’éviter l’effet de répétition depuis la rue. Un cadre type a été créé afin de recevoir, soit une baie vitrée, soit un panneau plein. Trois profils extrudés de terre cuite ont ainsi été créés avec pour chacun des angles de surface différents. Avec la mise au point d’un émail irisé, ces trois profils deviennent des surfaces de diffraction de la lumière pour le projet. La volonté était de créer une façade “atmosphérique” qui renvoie tant les reflets du ciel que de son environnement. »

CRBC, Centre de Recherche BioClinique à Clermont-Ferrand (63) 

Autre projet présenté par Anne-Françoise Jumeau : le bâtiment du Centre de Recherche BioClinique, au sein du CHU de Clermond-Ferrand. « L’image du bâtiment est totalement remaniée par de nouvelles façades. Les parties pleines et les parties vitrées sont constituées à partir d’éléments modulaires déclinés en taille et en coloris. Différents éléments de terre cuite émaillé noir irisé se combinent ; les menuiseries en aluminium anodisé sont composées de trois nuances dorées (or, bronze et champagne). Les parements et les menuiseries s’inscrivent dans la trame générale du projet. Modulaire, mais non répétitif, le dessin des façades est à la fois rigoureux et rythmé, homogène et non-uniforme. Les matériaux employés sont brillants et réfléchissants, sensibles aux variations de lumière. Ainsi la perception des façades change selon l’heure de la journée, le temps, la couleur du ciel… Le bâtiment interagit avec son environnement. »

Crèche 30 berceaux à Paris (XVe)

Ce quatrième projet s’inscrit dans le cadre de l’opération Grenelle-Frémicourt qui comprend la construction d’un immeuble de 54 logements sociaux rue Frémicourt et la construction d’un immeuble de 36 logements en accession boulevard de Grenelle. « Le bâtiment est implanté dans la cour intérieure sur le passage qui longe à l’ouest le site de l’opération. Les façades sur passage et sur jardin reçoivent une protection mécanique en bardeaux de céramique vernissée colorée. Cette vêture minérale se retourne partiellement en toiture. Au droit des baies, des pare-soleils également en terre cuite émaillée assurent une protection solaire. Les espaces extérieurs sont plantés et délimités par une clôture doublée d’une haie arbustive. Une aire de jeu ponctuellement recouverte d’un auvent reprenant les mêmes éléments qu’en façade est prévu le long du bâtiment. »

Atrium, bâtiment d’enseignement licence de l’UPMC Paris 6 

« Le bâtiment 16M conserve le système constructif existant en proposant une relation fluide entre la dalle Jussieu et l’esplanade du quai Saint-Bernard par un dispositif topographique : un “origami architectural”. Une enveloppe unificatrice de huit panneaux micro perforés en tôle d’aluminium, composés aléatoirement en fonction de l’orientation et des différents espaces intérieurs, forme une peau sensible, épaisse et brise-soleil. Derrière cette façade ajourée, se développe dans toute la hauteur du bâtiment un spectaculaire atrium central couvert desservant l’ensemble de salles de cours ou laboratoires. Depuis l’intérieur des salles, l’effet de filtre de la façade procure une vision très nette de l’extérieur tout en offrant un voile de protection visuelle et solaire. De grandes fenêtres urbaines à l’échelle du bâtiment permettent, par endroit, de dévoiler sa profondeur et de découvrir un patio loggia creusé dans son épaisseur jusqu’à l’atrium central. »

Trois autres prix et deux mentions spéciales décernés

Dans la catégorie Jeune femme architecte, qui récompense une professionnelle de moins de 40 ans, le prix a été attribué à Éléonore Morand (Depeyre Morand Architectures). Marion Tribolet (TKMT Architectes) a pour sa part reçu une mention spéciale Jeune femme architecte 2021. Le prix Œuvre originale est quant à lui décerné à Sara Martin Camara pour le Théâtre de la nouvelle comédie à Genève. Une mention spéciale a également été accordée à Béatrice Mouton pour son projet de Salle d’audience des procès sécurisés au Palais de justice de Paris. Enfin, le Prix international revient cette année à Farshid Moussavi (Angleterre), de Farshid Moussavi Architecture. 

Le Prix de la femme architecte 2020 décerné à Florence Lipsky

Florence Lipsky, Prix de la femme architecte 2020, Kansei TV
Florence Lipsky, Prix de la femme architecte 2020 succède à sa consœur Dominique Jakob récompensée en 2019. © Lipsky + Rollet Architectes.

Organisé depuis 2013 par l’Association pour la recherche sur la ville et l’habitat (ARVHA), le Prix femmes architectes s’adresse aux femmes architectes exerçant en France et inscrites au Conseil national de l’ordre des architectes. Cette distinction entend défendre le rôle des femmes dans le monde de l’architecture et du bâtiment. Son ambition est ainsi « de mettre en valeur les œuvres et les carrières de femmes architectes, afin que les jeunes femmes architectes puissent s’inspirer des modèles féminins existants, et d’encourager la parité dans une profession à forte dominante masculine. » Pour cette huitième édition, Florence Lipsky remporte le Prix de la femme architecte 2020.

À propos de Florence Lipsky

Lauréate de l’Équerre d’Argent pour la Bibliothèque universitaire des sciences du campus de La Source à Orléans en 2005, membre de l’Académie d’architecture, enseignante et chercheuse pionnière en architecture durable, le parcours de Florence Lipsky est remarquable et remarqué… En lui décernant le Prix de la femme architecte 2020, le jury de l’ARVHA salue « à l’unanimité » le travail et l’œuvre de cette architecte engagée, cofondatrice avec Pascal Rollet de l’agence parisienne Lipsky + Rollet Architectes. La lauréate définit leur agence comme « un lieu d’assemblage des résultats de toutes nos expériences industrielles et de nos recherches qui se retrouvent dans le cadre de nos projets ». Ces derniers mixent techniques ancestrales et de pointe avec la volonté d’aller « à l’essentiel » et à l’échelle du micro-territoire. 

Pour sa participation au Prix des femmes architectes 2020, Florence Lipsky a présenté cinq projets.

Les Grands Ateliers et Cité de la construction durable (2001)

Situés à Villefontaine en Isère, à proximité de Lyon, Grenoble et Saint-Étienne, Les Grands Ateliers de la Cité de la construction durable ont pour vocation de développer des activités de formations et de recherches collaboratives dans le domaine de l’architecture et de la construction durable. Mi-usine, mi-école, ce « bâtiment outil » à typologie industrielle « appartient à la catégorie des lieux hybrides qui mixte les caractéristiques d’un espace industriel, d’une scène et d’un espace d’enseignement ». 

Le Musée du Cristal Saint-Louis (2007)

Baptisé La Grande Place, le Musée du Cristal Saint-Louis est implanté au cœur des forêts vosgiennes, au sein même de la manufacture de Saint-Louis-lès-Bitche fondée en 1586. Le musée prend place dans la grande halle de production, au-dessus de la fosse ouverte du foyer d’un ancien four. Indépendant, il ne touche ni les murs, ni le toit, ni la structure de la halle qui l’abrite. L’audacieux projet reprend l’idée séduisante de la rampe et de la promenade architecturale. Ce parti pris permet de changer de niveau en douceur en suivant une pente douce qui s’enroule autour de grandes étagères en bois enveloppées de polycarbonate. 

Immeuble de logements ZAC Rive de Seine (2011)

Implanté à Boulogne-Billancourt, dans la Zone d’aménagement concerté Rive de Seine, cet immeuble de 143 logements dispose d’une implantation exceptionnelle en balcon sur le grand parc du Trapèze, avec vue sur les collines de Meudon. L’immeuble est un corps de bâtiment linéaire composant le front de parc en formant « un paquebot » dirigeant sa proue sur l’espace public, et deux tourrettes articulées avec le corps principal dans le cœur d’îlot. La construction est une structure béton vêtue d’une peau en bardage translucide qui assure l’isolation par l’extérieur. Le bâtiment favorise le maximum de logements traversants et offre aux habitants un confort de vie en été et en demi-saison par la mise en place de puits canadiens. Au Sud, la protection solaire est assurée par des volets mobiles qui renforcent l’idée que le balcon est aussi un espace à vivre. 

Maison de l’Inde de la Cité universitaire internationale de Paris (2013)

L’extension de la Maison de l’Inde de la Cité universitaire internationale de Paris est une construction nouvelle sur le site. La première depuis 1969. Il s’agit du premier bâtiment de sept étages en structure bois et noyau béton réalisé en France. Un projet inspiré de l’architecture de Doschi (Prix Pritzker 2018) où chaque détail (de grands balcons très profonds, une cuisine-salle à manger à chaque étage, meubles intégrés, peintures warli…) est attaché à la vie sociale et au confort des étudiants.

Euralille (2019)

Le programme Ekla est un programme mixte de la ZAC du Centre international d’affaires des gares de Lille, aujourd’hui connue sous le nom d’Euralille. Il se compose d’un immeuble de bureaux (Ekla Business), ressemblant à un trapèze aux parois inclinées, et d’une résidence de 107 logements (Ekla Life) composée de deux plots de moyenne hauteur et d’une tour de dix-sept étages. Au milieu, un jardin et une voie piétonne traversante, lieu de bien-être qui agit tel un « filtre » entre les bureaux et les habitations. Ce projet illustre une nouvelle fois un travail approfondi sur la densité et la relation avec l’extérieur. 

Trois autres prix et une mention spéciale décernés

Quatre autres récompenses ont également été attribuées. Le Prix jeune femme architecte récompense cette année un trio de femmes : Stéphanie FranceschiMarie Fade et Caroline Mangin, cofondatrices de l’agence marseillaise Oh!Som. Le Prix œuvre originale est attribué à Cathrin Trebeljahr pour son projet Réhabilitation et extension de l’ancienne préfecture de Versoix près de Genève, en Suisse. La mention spéciale œuvre originale est donnée à Sophie Denissof de l’agence Castro Denissof Associés pour sa tour Habiter le ciel à Aubervilliers (93) et pour son parcours professionnel. Anna Heringer (Allemagne) et Benedetta Tagliabue (Espagne), ex aequo, reçoivent chacune le Prix international pour leur parcours et leur œuvre respective. 

Au total, plus de quatre cent soixante-dix femmes architectes se sont cette année portées candidates présentant quelque mille cinq cents projets… Traditionnellement organisée au Pavillon de l’Arsenal à Paris, la cérémonie de remise des prix s’est exceptionnellement cette année tenue en visioconférence retransmise en live sur la page Facebook de l’ARVHA. 

Le Prix de la femme architecte 2019 décerné à Dominique Jakob

Organisé depuis 2013 par l’Association pour la recherche sur la ville et l’habitat (ARVHA), le Prix femmes architectes s’adresse aux femmes architectes exerçant en France et inscrites au Conseil national de l’ordre des architectes. Cette distinction entend défendre le rôle des femmes dans le monde de l’architecture et du bâtiment. Son ambition est ainsi « de mettre en valeur les œuvres et les carrières de femmes architectes, afin que les jeunes femmes architectes puissent s’inspirer des modèles féminins existants, et d’encourager la parité dans une profession à forte dominante masculine. »

Pour cette septième édition, Dominique Jakob de l’agence parisienne Jakob + MacFarlane remporte le Prix de la femme architecte 2019 décerné en décembre au Pavillon de l’Arsenal, à Paris. Trois autres récompenses ont également été attribuées à Marie Perin (Jeune femme architecte), Fabienne Bulle (Œuvre originale) et Francine Houben (Prix international). Au total, quatre cents femmes architectes se sont cette année portées candidates présentant quelque mille quatre cents projets… Dominique Jakob a quant à elle fait le choix de présenter au jury cinq réalisations.

La Cité de la mode et du design à Paris (2008)

Cité de la mode et du design, Dominique Jakob, Prix femme architecte 2019, Kansei TV

© Jakob + MacFarlane/Nicolas Borel.

La Cité de la mode et du design a été réalisée dans les anciens édifices des Docks de Paris. Inspiré par les flux de la Seine et ceux des promenades sur les berges du fleuve qui mènent jusqu’aux nouveaux quartiers de Seine Rive Gauche, le projet transforme le bâtiment industriel en mettant en relief son ossature en béton originelle datant de 1907. Une nouvelle enveloppe constituée d’une structure tubulaire métallique et de verre sérigraphié, baptisée plug-over, vient protéger la construction existante et les nouvelles fonctions greffées sur celle-ci. Cette nouvelle peau extérieure permet non seulement d’exploiter au maximum l’enveloppe du bâtiment mais aussi de mettre en place un espace public fluide et continu. Le bâtiment prolonge ainsi les promenades publiques en surplomb au-dessus de la Seine jusqu’à sa grande terrasse panoramique.

Les cent logements Hérold à Paris (2008)

Logements Hérold, Dominique Jakob, Kansei TV       Logements Hérold, Dominique Jakob, Kansei TV

Les cent logements Hérold est une réhabilitation de la parcelle de l’ancien hôpital Hérold dans le 19earrondissement de Paris. Dans le but de concevoir des logements sociaux de qualité, le projet s’est inscrit dans une démarche écoresponsable. Sur un terrain en pente, les trois immeubles aux plans verticaux octogonaux et aux plans horizontaux ondulants composent une réelle scénographie urbaine. Possédant un jardin intérieur, ces logements sociaux ont été conçus pour offrir à leurs occupants un mode de vie de qualité. Chaque habitation bénéficie ainsi de larges ouvertures extérieures permettant un apport de lumière naturelle et possède un balcon pour pouvoir profiter au maximum de l’orientation vers le sud.

Le Cube Orange à Lyon (2010)

Cube Orange, Dominique Jakob, Prix femme architecte 2019, Kansei TV      Cube Orange, Dominique Jakob, Prix femme architecte 2019, Kansei TV

Le Cube Orange se dresse dans le quartier des Docks de Lyon, sur les rives de la Saône. Abritant le siège social du promoteur immobilier Groupe Cardinal et un showroom de design contemporain, le bâtiment est conçu comme un cube orthogonal découpé par un grand vide répondant aux besoins de lumière, de circulation d’air et de vues. Ce cube évidé est revêtu d’une seconde peau d’aluminium perforée faisant référence au minium, couleur industrielle récurrente sur les sites portuaires. Le dernier étage est traité en retrait avec une grande terrasse depuis laquelle on peut apprécier tout le panorama de Lyon, la Fourvière et Lyon-Confluence.

Les Turbulences, Frac Centre à Orléans (2013)

Frac Centre Orléans, Dominique Jakob, Prix femme architecte 2019, Kansei TV

© Jakob + MacFarlane/Roland Halbe.

Le nouveau Frac Centre (Fonds régional d’art contemporain) est construit à Orléans sur le site des subsistances militaires. Cette opération de réhabilitation des anciens bâtiments datant du XIXe siècle s’accompagne de la création d’une nouvelle structure décomposée en trois excroissances de verre et d’acier appelées les Turbulences. Intégralement conçue au moyen d’outils numériques, cette architecture est recouverte d’éléments tous uniques : panneaux extérieurs en aluminium pleins ou perforés, et intérieurs en bois. Le projet a été nominé au prix de l’Équerre d’Argent en 2013 et a reçu la mention spéciale aux A+ Awards en 2014.

Le siège social d’Euronews à Lyon (2014)

Siège Euronews, Dominique Jakob, Prix femme architecte 2019, Kansei TV

© Jakob + MacFarlane/Nicolas Borel.

Ce projet a été conçu en 2005 pour le même concours que le Cube Orange déjà construit sur la rive de la Saône. Les deux bâtiments ont été désignés de sorte qu’ils puissent être vus par le public le long des quais comme un ensemble de bâtiments affichant des morphologies différentes mais néanmoins en dialogue. Conçu comme un immense parallélépipède, le Cube Vert est creusé dans son épaisseur par deux formes coniques qui libèrent des vides spectaculaires au sein de la masse construite. Ces dernières prennent base au cœur du bâtiment pour s’ouvrir largement sur la façade vers le fleuve et ouvrir la vue au maximum. Ces atriums sont également imaginés comme deux yeux gigantesques sur le fleuve et son environnement. Symboliquement, les yeux représentent également ceux d’Euronews, récepteurs abstraits, capturant les événements du monde qui nous entoure.

Dominique Jakob, Kansei TV

Dominique Jakob, Prix de la femme architecte 2019 succède à sa consœur Nicole Condorcet récompensée en 2018. © Alexandre Tabaste.

À propos de Dominique Jakob

Dominique Jakob est diplômée de l’École d’architecture Paris-Villemin (1991) et titulaire d’une licence en histoire de l’art. Elle enseigne à l’École d’architecture Paris-Villemin et Paris-Malaquais de 1994 à 2004, à l’École spéciale d’architecture, ainsi qu’au Southern California Institute of Architecture de Los Angeles en 2018. Dominique Jakob est également membre titulaire de l’Académie française d’architecture depuis 2016. Avec Brendan MacFarlane, elle fonde en 1998 l’agence Jakob + MacFarlane qu’ils orientent ensemble « comme un laboratoire expérimental en architecture tourné autour de la transition environnementale et la culture du numérique. » Trois ans plus tard, elle devient Officier des arts et des lettres. De 2012 à 2018, Dominique Jakob est choisie par la Ville de Toulouse comme architecte conseil auprès des services de l’urbanisme.

Le Belaroïa : le bijou de Montpellier de Manuelle Gautrand

L’agence Manuelle Gautrand Architecture a livré en septembre le Belaroïa, bijou en occitan, une opération mixte en plein cœur de Montpellier. © Luc Boegly.

 

Le premier bâtiment de la ZAC Nouveau Saint-Roch de Montpellier a été livré en septembre dernier. Le Belaroïa, bijou en occitan, signé par Manuelle Gautrand est un véritable écrin à l’architecture contemporaine. Pour cette opération, la ville a encouragé une forte mixité traduite par un projet hybride. Le complexe imaginé par l’architecte Manuelle Gautrand comprend ainsi plusieurs lieux de vie.

Deux hôtels, le Golden Tulip (quatre étoiles) et le Campanile Montpellier Centre (trois étoiles), mais aussi un business center, un restaurant bistronomique Chez Delagare, un bar à cocktail et sa terrasse, un espace de spa et de bien-être… Et douze appartements de prestige dans les étages supérieurs du bâtiment. De véritables villas sur le toit avec terrasse solarium offrant un ensoleillement maximal et une vue panoramique exceptionnelle, et pour certains équipés de cuisine d’été et de bassin de nage.

Un bijou de technicité

© Luc Boegly.

© Luc Boegly.

Le Belaroïa est constitué d’un volume de six étages qui se plie à angle droit puis s’élève de quatre niveaux et se retourne sur lui-même pour venir se poser sur le volume inférieur. Avec ce grand pliage, le projet de Manuelle Gautrand ne possède ni façades principales ni façades arrière. Il est une boucle continue de programmes qui se succèdent, tous enveloppés par une matérialité claire et homogène.

« La petite taille de la parcelle nous a incités à superposer les fonctions, littéralement les unes au-dessus des autres, tout en mutualisant quelques circulations verticales entre les programmes. »

L’ensemble du bâtiment est unifié par une résille d’acier laqué blanc, plus ou moins ajourée, à la manière d’un moucharabieh. Pièce majeure du Belaroïa, la terrasse en belvédère constitue un vide autour duquel les pleins s’enroulent. Posée sur un podium regroupant les entrées, elle est entourée par les deux hôtels et surplombée par les logements.

Manuelle Gautrand, Kansei TV

© Joelle Dolle.

À propos de Manuelle Gautrand

Lauréate de dizaines de prix d’architecture, les projets de Manuelle Gautrand sont régulièrement salués par la profession. Un parcours exceptionnel récompensé entre autres en 2017 par le prestigieux prix européen d’architecture décerné pour la première fois à une femme.

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Réalisé par : La Collab